samedi 18 octobre 2008

:: Fabliau des temps qui courent, taïaut !


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:: Fabliau des temps qui courent, taïaut !

Après avoir flambé tout l'été, les Bourses du monde entier, se trouvèrent fort démunies, et même carrément dépourvues quand la crise fut venue. Pas un seul petit pigeon à plumer, pas la moindre perspective de profit inespéré, tant et si bien que même les fonds souverains faisaient grise mine et gorges chaudes.

Il faut dire qu'elles l'avaient bien cherché, les Bourses florissantes, à force d'audacieuses et merveilleuses spéculations, ce retour de bâton qui frappe inévitablement les joueurs et les joueuses compulsifs, toujours persuadés de gagner plus, à tous les coups, au prochain coup fumant.

Dans la galerie, bien sûr, tous les gouvernements et les mauvais garnements avaient applaudi les artistes, du temps de leurs exploits mirifiques, ignorant les conséquences pour le moins sinistres, pour la population moyenne, qui épargne, comme elle peut, et pour les moins bien lotis, les autres, qui n'ont pas même de quoi épargner, ni leur peine, ni leur faim, et se contentent de fréquenter, les pauvres, dame misère.

Quand la crise fut venue, par simple accumulation de promesses vides, de prêts sans contrepartie, de produits trop fabuleusement calculés, de supputations hasardeuses, et tout simplement par manque de moyens pour continuer à jouer, ayant tous et tout épuisé des hypothèques et des obligations, des contrats garantis et des garanties sans fondement, les mauvais garnements appelèrent au secours, leurs petits copains, respectables banquiers, les établissements financiers, et leurs courtiers, les bancassureurs, comme on dit, les réassureurs, et quelques autres oiseaux du même acabit, et de mauvais augure. Aucun ne répondit, évidemment, car chacun était déjà plus ou moins dans le même cas.

En urgence, on réunit alors les grands argentiers, les experts, les économistes, et quelques comptables, on consulta de toute part, pour tenter d'éviter, que de fil en aiguille, une faillite ici en entraîne une autre là, jusqu'à l'effondrement généralisé et subséquent de toutes les places financières, le fameux krach mondial, et par la même occasion, celui des entreprises qui y jouent leur réputation future, et leur capacité à fournir des juteux dividendes.

A quoi sert, dira-t-on, d'avoir des amis haut placés, dans les sphères du pouvoir, si ce n'est pour renvoyer les ascenseurs, effacer les bévues, et distiller quelques jolies sentences bien musclées, contre les lampistes, certes, pour faire passer la pilule, après l'avoir suffisamment dorée.

Dans les coulisses, on obtint de quelques serviteurs déguisés en monarques, une généreuse subvention pour requinquer les malheureux banquiers, et leur éviter la plus totale des déconfitures, la clé sous la porte, la banqueroute, la faillite. Sombre série, dépression, cyclone, tsunami, récession, l'ombre d'un vide mortel, qui plane, et s'annonce inéluctable. Mais de partout, on assurait et répétait à l'envi que ce ne serait qu'un petit grain, un incident de parcours, rien de grave...



La faillite, nous voilà, et l'Europe tout entière s'engagea à la suite et de suite sur les pas de la glorieuse Amérique états-unisienne.

Mille milliards de dollars, pas moins, étaient nécessaires pour renflouer la barque, de ce côté-là de l'Atlantique, et l'Europe, comme une grande, promis de son côté d'injecter dans le système quelque mille trois cents milliards, - d'euros, s'il vous plaît, dans quelques établissements financiers échoués sur le sable ou sur la paille, comme on voudra.

Doublons la mise, vieille ritournelle.
Si bien que pour combler le trou, on creusa un plus grand trou, gigantesque et abyssal, du même coup.
Enfin, pratiquement, un puits sans fond.
Subséquemment, on promit à grands cris de réformer le système, sérieusement, et même de le moraliser, pas moins, - ce qui laisse à penser, et ne manquera pas d'amuser les connaisseurs.

Pour la petite histoire, à qui confier les rênes de l'organisme financier chargé de distribuer le crédit aux établissements financiers en manque de liquidités à prêter pour faire tourner la boutique, relancer la machine, et récolter les divins dividendes ? La question méritait d'être posée...

Voyons.
A qui faire confiance, pour jouer les pompiers, sinon aux pyromanes eux-mêmes, qui s'y connaissent vraiment en matière d'incendie, et disposent déjà de quelques allumettes... Ce raisonnement imparable et exemplaire fut donc choisi, en France, et sans doute suivi de merveilles du même tonneau, dans les pays voisins.

On confia donc aux banques la mission de sauver les banques avec l'argent qu'elles n'avaient plus, et en garantissant l'argent qu'elles emprunteraient, pratiquement sans limite.

N'est-ce pas là une bonne, excellente et audacieuse nouvelle ?

A moins, évidemment, que les bonnes gens ne finissent par leur dire, gentiment, et fermement, que ça suffit comme ça.
Réellement.
Vraiment ?



Voulez-vous rire ? La grande presse agite depuis quelques temps les spectres du socialisme, qui s'est abattu sur Wall Street, paraît-il, en nationalisant quelques canards boiteux, et même du communisme, une idéologie déjà antique, qui rêvait de socialiser le capitalisme, en le mutualisant...

Quand on y réfléchit...

Le monde en plein délire, comme remède au cauchemar, en quelque sorte.



Un instructif exemple, signé Alain Badiou, "philosophe, romancier, éditeur", pas moins :

http://www.lemonde.fr/opinions/article/2008/10/17/de-quel-reel-cette-crise-est-elle-le-spectacle-par-alain-badiou_1108118_3232.html#xtor=EPR-32280154



Et un parfait petit chef d'oeuvre d'hypocrisie, signé d'un "secrétaire général adjoint des Nations Unies", pas moins :

http://www.lemonde.fr/opinions/article/2008/10/17/sauver-les-banques-ou-les-pauvres-par-philippe-douste-blazy_1108117_3232.html#ens_id=647065

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Post-scriptum

:: Pot aux roses

De jour en jour, le pot-aux-roses prend peu à peu une autre odeur, assez fumeuse, pour ne pas dire pire.

Le temps de l'écrire, et voilà que le montant estimé du plan de sauvetage européen atteint, pour l'instant,
1 700 milliards, et non plus 1 300, soit, quand même 400 milliards d'euros en plus, une paille.
Dans ce petit magot, le plan français représente environ 360 milliards d'euros, et rien ne dit que ce sera suffisant.

On apprend, dans le même temps, que les Caisses d'épargne, oui, celles de l'Ecureuil, le symbole même de l'épargne tranquille pour les Français, ont perdu, sur leurs fonds propres, 600 millions d'euros, une paille. Mais faute avouée est sans doute à demi pardonnable, - c'étaient de leurs fonds propres, parfaitement propres, qu'il s'agissait. Sans blague.
Quant à la réalité, elle est probablement encore plus brillante, on parie ?

Evidemment, si la "spirale de la défiance" venait à s'aggraver, - aucune raison de s'inquiéter, bien sûr, - la dette publique pourrait rapidement devenir intenable, disent les spécialistes, qui connaissent la manoeuvre.
Bons du Trésor, obligations d'Etat, il en circule déjà beaucoup, et l'inflation les guette, au tournant.

Quant au poids de la dette publique, elle pèse déjà directement, dans le budget de l'Etat, sous la forme des intérêts de la dette, et pourrait s'arrondir, pour la France, de 52 à 65 milliards d'euros. Environ. Une paille.

A terme, le retour attendu de la fameuse croissance pourrait, certes, faciliter les choses, mais dans le cas contraire, quand même plus probable, la hausse des impôts et la baisse de dépenses de l'Etat viendront peser sur la vie des citoyens, contribuables et ménages, dont le pouvoir d'achat baissera.

Quand nous aurons fini de payer pour "sauver les banques", au moins quelques-unes, et de renflouer le système financier, (qui nous aura bien floués, tous, et les uns et les autres,) ... les banques auront-elles encore des clients ?

Pas si sûr...

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:: En savoir plus :

http://www.lemonde.fr/la-crise-financiere/article/2008/10/18/comprendre-les-plans-de-sauvetage_1108469_1101386.html
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:: Et toute la question devient : combien de temps cela va-t-il durer ?

Daniel Cohen, un économiste distingué, explique sa vision de l'histoire de la crise, et parle fort bien des dogmes en cours, dans la sphère de l'économie capitaliste mondiale. Perversion, ultra-libéralisme, spéculation, débridée, années noires, et par dessus le marché, quelques perles d'économiste, pas nécessairement amusantes :

"Quand on réfléchit avec le recul, c'est assez extraordinaire !"
"On n'observe aucune crise majeure du système bancaire durant les "trente glorieuses"."
"La première erreur à éviter serait de croire qu'après cette crise le capitalisme va se moraliser tout seul."

http://www.lemonde.fr/la-crise-financiere/article/2008/10/17/crise-le-proces-d-une-perversion-du-capitalisme_1108292_1101386.html
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blog 181008
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:: Un blog SGDG
sans garantie du gouvernement
et parfaitement futile, évidemment
http://pacoalpi.blogspot.com/
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:: Et quelques textes de référence :
http://www.scribd.com/people/documents/21977
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