mardi 22 juillet 2008

:: La pauvreté se porte bien, merci...

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mardi 22 juillet 2008

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● Notes sur le Rapport CNUCED 2008 sur les pays les plus pauvres

Divulgué la semaine dernière, le "Rapport 2008 sur les pays les moins avancés" de la CNUCED, Conférence des Nations-Unies pour le Commerce et le Développement, en dit assez long sur l'état du monde, et la main-mise des pays riches sur les pays les plus pauvres.
PMA, pays les moins avancés, dans le jargon international.

La croissance de l'économie mondiale, curieusement, provient pour beaucoup des pays pauvres, pour cause de crise du système mondial, de chute du dollar, de hausse des prix de l'énergie et de l'alimentation, même si la part des pays riches dans l'économie mondiale demeure prépondérante.

Qui dit croissance ne dit pas nécessairement amélioration des niveaux de vie, baisse des taux de pauvreté relative, développement humain.
Les chiffres cachent les réalités, bien souvent.

:: En fait, la fameuse croissance, c'est surtout le résultat de la hausse des prix du pétrole, des minéraux, des matières premières, des produits de base, dont la demande continue de croître.

:: En fait, les pays les plus pauvres continuent de dépendre de l'aide internationale, et manquent de ressources, de moyens d'investissement, de structures de production, notamment. Ces pays dépendent aussi des fonds envoyés par les travailleurs expatriés, émigrés dans les pays plus riches et demandeurs de main d'oeuvre.

Résultat, les populations des pays pauvres connaissent toujours la misère, ce que mesurent les taux de pauvreté classiques :

En 2005, 36 % de la population totale de ces pays vivaient dans l'extrême pauvreté − soit avec moins de 1 dollar par jour − et 76 % avec moins de 2 dollars par jour.

Et le nombre des personnes pauvres et très pauvres augmente, si l'on compare les chiffres 2005 et 2000.

:: En fait, la hausse des prix des denrées alimentaires, qui devrait permettre une meilleure rémunération des producteurs, a surtout pour résultat d'augmenter le risque des famines, l'aliment de base devenant inaccessible, ce qui menace évidemment les plus faibles, les enfants, les femmes, les vieillards, et les malades.

● Est-ce une surprise ?

Le modèle de développement des pays pauvres ne conduit pas à une amélioration du niveau et des conditions de vie des populations, parce que, dit le rapport :

"le type de croissance économique enregistré ne correspond généralement pas à un processus de développement partagé".

Grande nouvelle, donc, les pays pauvres manquent de productivité...


Le modèle de développement des PMA, qui consiste le plus souvent à répondre aux besoins du marché mondial, et de l'économie libérale, a comme résultat de servir les pays les plus riches, et non l'inverse...


De plus, la dégradation des perspectives économiques mondiales, - entendez la menace d'une récession dans les pays riches, - ne va certainement pas améliorer la situation. Le risque existe même, en raison de la vulnérabilité des populations les plus pauvres, "de troubles sociaux et de conflits", selon ce rapport.

Quelles solutions, voyons...

Pour parvenir à une croissance économique plus durable, accélérer la réduction de la pauvreté et améliorer la situation sociale dans les PMA, il faut adopter des stratégies nationales de développement efficaces, apporter une aide efficace au développement et mettre en place des régimes internationaux favorables au développement dans les domaines du commerce, de l'investissement et de la technologie.


Quelle meilleure manière de dire que, dans les faits, la croissance actuelle n'est pas durable, qu'elle n'a pas permis de réduire la pauvreté, que l'aide au développement s'avère pratiquement inefficace ?


Quelle meilleure manière d'avouer que, dans les faits, les régimes douaniers, les règles du commerce international, le jeu des investissements, l'absence de progrès technologiques, ont conduit à la situation présente ?

Faut-il ajouter que les pays riches, partenaires et clients, ne jouent pas le jeu, qu'ils ne respectent pas leurs engagements, en termes d'aide au développement, et maintiennent les pays pauvres dans la dépendance, en "conditionnant" leurs éventuel soutien, à des contrats souvent léonins...?

Le rapport suggère de favoriser les solutions endogènes, certes.

Il propose que la gestion de l'aide permette une meilleure appropriation de celle-ci par les acteurs eux-mêmes, certes.

A lire entre les lignes, on imagine bien que la meilleure solution serait ... que les pays pauvres se débrouillent par eux-mêmes pour sortir de la misère, sans doute.

Mais avec quoi ?

Dans l'examen des résultats récents, on aperçoit le poids des exportations de pétrole, de minéraux, dont la valeur marchande a cru sur le marché mondial. Résultat, les pays pauvres qui réussissent le mieux ont simplement exporté leurs matières premières, et leurs produits de base, agricoles, souvent.
C'est le cas notamment des pays pauvres africains, tandis que les pays pauvres asiatiques exportaient surtout des services, entendez de la main d'oeuvre, et parfois des produits manufacturés à faible valeur ajoutée.
Compte-tenu de la compétition internationale, certains pays pauvres ont même connu une désindustrialisation relative, et une baisse du secteur industriel dans leur PIB.

Dans ce contexte, que font les pays riches ?

Quand ils investissent dans les pays pauvres, c'est
dans "l'extraction de ressources naturelles, en particulier de pétrole et de minéraux", et ils rapatrient les bénéfices, bien sûr.

Quand ils promettent une aide, le plus souvent, ils ne tiennent pas complètement parole, sauf quelques exceptions vertueuses.


Quand ils acceptent d'embaucher des travailleurs migrants, ils contribuent, indirectement, à une sensible amélioration des conditions de pauvreté, à court terme, certes.

Quant à la pauvreté, la misère et le manque, elles se portent bien...

Nous estimons qu'en 2005, 277 millions de personnes vivaient avec moins de 1 dollar par jour dans l'ensemble des PMA,dont 206 millions en Afrique, 71 millions en Asie et 1 million dans les États insulaires.

En 2005, 581 millions de personnes vivant avec moins de 2 dollars par jour dans les PMA, ce qui correspond aux trois quarts de la population et montre que la pauvreté continue d'être très répandue dans ces pays.

De plus, dans les pays pauvres du groupe des PMA,

- la consommation ne suit pas l'évolution de la croissance, pour cause de pauvreté généralisée,
- la croissance démographique touche plus les pays pauvres, et augmente donc les populations les plus pauvres, sans que le nombre d'emplois suive, sans parler des salaires, et de leur niveau,
- la productivité agricole reste faible, et ne croît pas, ou pas assez,
- l'exode rural ne débouche pas toujours sur une amélioration, on voit une augmentation de la pauvreté urbaine,
- l'accroissement des inégalités de revenus freine la baisse potentielle de la pauvreté...

Rien de bien neuf, en somme, - quelques progrès parfois, en matière de scolarisation et d'enseignement primaire, mais beaucoup reste à faire, pour l'accès à l'eau, l'assainissement, notamment, pour diminuer l'incidence de la faim, et la mortalité infantile.
La hausse des prix alimentaires vient encore obscurcir le tableau, globalement, jusqu'à aggraver la situation d'urgence alimentaire, dans quelque 20 pays pauvres ou très pauvres.

Les spécialistes de la CNUCED dressent un bien sombre bilan, et proposent de prévoir une réorientation des stratégies de développement,
- en encourageant la production, la productivité, les capacités productives, agricoles et industrielles, notamment,
- en améliorant l'emploi productif, et les revenus de l'emploi, pour diminuer la pauvreté,
- en cherchant un meilleur équilibre entre les Etats et les marchés, pour promouvoir le développement et réduire la misère...

Comment est une autre question, évidemment.

Quelques grands principes suffiront-ils ?

Les belles et bonnes idées s'appellent : développement durable, solidaire, partenaire, créativité, appropriation locale par les acteurs, coopération, engagement, responsabilité des gouvernements, confiance mutuelle, - etc., etc.

Dans la pratique, a-t-on vu des résultats satisfaisants ?
La réponse est évidente, pourtant...

Il y a dans la relation entre les donateurs et les bénéficiaires de l'aide ou du financement international bien des non-dits, bien des manquements, et quelques effets pervers, sans doute.

Mais l'obstacle central peut-il être désigné, dans le cadre des Nations-Unies telles qu'elles fonctionnent, - là aussi, la réponse est évidente, pourtant...

Entre les lignes, on aperçoit encore une fois le jeu du rapport des forces en présence, dont la logique économique et marchande est l'un des termes, et la stratégie politique l'autre terme.

Jusqu'à présent, c'est la misère, la pauvreté, et l'échec, qui ont gagné la partie.
Jusqu'à quand ?

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Le texte de présentation de ce rapport est ici :
http://www.unctad.org/fr/docs/ldc2008overview_fr.pdf

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:: Un blog SGDG
sans garantie du gouvernement
et parfaitement futile, évidemment
http://pacoalpi.blogspot.com/
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1 commentaire:

Anonyme a dit…
Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.

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