vendredi 17 septembre 2021
Lao Tseu – Chemins –
Lao Tseu – Chemins –
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Lao Tseu
– Chemins –
Strophes et Quatrains, -- Lao Tseu
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Traduction minutieuse et libre
Alain Constantin & Paco Alpi
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nouvelle édition,
revue et révisée,
texte intégral.
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1
Lao Tseu – Chemins –
– Chemins –
Strophes et Quatrains
– Lao Tseu –
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道 德 真經
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Traduction minutieuse et libre
Alain Constantin & Paco Alpi
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#dao
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2
Lao Tseu – Chemins –
Prologue
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Aucune explication n'est sans doute nécessaire à ce texte hasardeux,
et légèrement bizarre, sinon un préambule, qui ne devrait pas vous
empêcher de naviguer joyeusement parmi ces pages, comme disent
les vignerons.
Le taoïsme est une déambulation, un cheminement, que ne guide pas
vraiment le discours souvent paradoxal que l'on attribue à Lao Tseu.
Bien des erreurs, des non-sens, des contre-sens, des bourdes et des
absurdités ornent et défigurent les traductions innombrables des
propos pourtant concis de Lao Tseu.
Le présent texte n'y échappera pas, comme il se doit. C'est d'ailleurs
une traduction libre, comme se voulait Lao Tseu, - non sans illusions.
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3
Lao Tseu – Chemins –
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Ce texte existe dans une version enrichie de commentaires, plus ou
moins légendaires, toute une histoire, en somme.
Bon voyage, Lao Tseu !
http :// www. scribd. com / doc /210294540/ Bon - Voyage - Lao -Tseu
Lao Tseu -- Chemins --
http :// www. scribd. com / doc /215821242/ Lao - Tseu -% E2%80%93-
Chemins -% E 2%80%93- v 03-pdf
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4
Lao Tseu – Chemins –
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#1
Le chemin que suit le cheminement
n'est pas toujours juste le chemin,
et les mots pour le dire ne sont
pas toujours juste des paroles.
Sans un mot, sans paroles,
le ciel et la terre sont, ce mouvement
d'où proviennent les choses et les êtres,
que l'on peut nommer, multitude.
C'est ainsi, source de merveilles,
ce qu'il suffit de contempler,
attentif aux détours du chemin,
comme à ce qu'il y advient.
Mystérieuses et obscures,
semblables et différentes, apparitions,
passage invisible ou secret de ce qu'il advient,
comme une porte ouverte.
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道
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Lao Tseu – Chemins –
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#2
Sous le ciel, partout, la beauté,
à l'horizon, quelques nuages,
puis vient le temps de la décrépitude,
immanquablement, inévitable.
Chacun sait ce qui bon, et lui fait du bien,
et de là connaît ce qui ne l'est pas.
Ce qui est aisé, et ce qui est difficile,
se complètent mutuellement,
Le haut et le bas, le long et le court,
sont formes relatives et connexes,
le son et le bruit se conjuguent,
et le sage demeure ailleurs.
Sans un mot, il enseigne,
c'est pourquoi on l'écoute,
et la foule en liesse applaudit !
Puisqu'il n'en attend rien...
Il vit sans rien escompter en retour,
- accomplissement.
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道
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Lao Tseu – Chemins –
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#3
Si les Honorables n'étaient plus honorés,
le bon peuple aurait-il encore
quelque raison de se révolter ?
Sans le prix inaccessible des marchandises
de valeur, y aurait-il des voleurs ?
Sans l'apparence des biens trop désirables,
l'esprit et le cœur du bon peuple
serait-il troublé ?
Le sage sait qu'il ne convient pas
d'entretenir de faux espoirs.
Il songe à vider son cœur, et remplir son ventre,
comme chacun, pour retrouver des forces.
Et tenir le peuple dans l'ignorance, et l'apathie,
quel rêve fou !
Aussi n'en fait-il rien !
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Lao Tseu – Chemins –
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#4
Le juste chemin ressemble au silence,
vide de paroles, inépuisable pourtant,
langage fécond, source de tous les mots.
Insondable, il produit la forme et l'apparence
de toute chose, simple et spectaculaire
comme le moindre torrent, source de vie.
Il suit librement sa pente, son chemin,
éparpille ses gouttelettes dans la lumière,
se perd comme poussière, limpide ruisseau.
Comme un trésor précieux et secret,
comme l'apparence de la puissance,
savoir immémorial comme un présent.
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Lao Tseu – Chemins –
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#5
Le ciel ni la terre n'ont rien d'humain.
Nous ne sommes que fétus de paille,
éphémères, au regard du sage.
Nous ne sommes que passagers,
souffle dans un flûtiau de roseau.
Inépuisable image du manque,
du vide qui nous anime, multiples
paroles, dénuées de sens, hélas !
Garder le milieu du chemin,
simple sagesse…
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Lao Tseu – Chemins –
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#6
Le secret discret de la vallée obscure
demeure, inénarrable, déité féminine.
C'est un passage, une porte, la racine
du temps et de la vie, un chemin,
un doux réservoir de vie.
Comme un charme mystérieux,
permanent et présent, immanent.
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#7
Le ciel et la terre demeurent, comme horizon.
Entre le ciel et la terre, circulent le temps,
l'énergie, le devenir de chacun, la vie en somme.
Ainsi se produit la vie, elle advient, se perpétue.
Le sage ignore le devenir de sa personne,
et ne s'en préoccupe pas pour autant,
c'est bien parce qu'il ne s'en préoccupe pas
qu'il demeure sage, dépositaire de sa sagesse.
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#8
D'abord, ce qui est bon est comme l'eau,
elle alimente la multitude sans jamais combattre,
elle demeure même dans les lieux impraticables,
ainsi ressemble-t-elle au bon chemin,
qui habite même l'insondable, comme
précisément la bonté humaine, n'est-ce pas ?
Ce qui est bon cherche à s'étendre, distribution,
et la bonté gagne l'espace et le temps,
sans discussion, sans reproche, la bonté.
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Lao Tseu – Chemins –
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#9
Rien ne demeure, le plein se vide,
le tranchant ne se garde, et s'émousse,
ni l'or, ni le jade du trésor
ne se peuvent conserver sans fin,
la richesse et l'arrogance attirent
le blâme et la réprobation.
Dès lors l'accomplissement
comporte de devoir se retirer,
telle est la bonne démarche,
le bon chemin. Simple bon sens.
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#10
Méditation, tenir l'esprit et le corps
comme s'ils n'étaient qu'un, et maintenir cela,
est-ce possible ? Le peux-tu ?
Régler ton souffle, respiration douce,
comme celui du nourrisson, spontané,
est-ce possible ? Le peux-tu ?
Contempler la réalité mystérieuse d'un œil lucide,
sans faillir ni défaillir... Le peux-tu ?
Aimer le pays et le peuple, l'aider
sans même agir, le pourrais-tu ?
Suivre la bonne conduite, le juste chemin,
en respectant l'obscure racine des choses,
leur insondable douceur, le sais-tu ?
Porter la lumière de toute part, en tout lieu,
paraître pourtant ignorant de tout, le peux-tu ?
Donner vie à la vie, comme elle vient,
sans jamais chercher à la posséder,
agir sans escompter de retour, sans violence,
lumineux secret du juste chemin.
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#11
Trente rayons s'assemblent
autour du moyeu de la roue.
Ainsi, le vide permet au chariot d'avancer.
Le potier tourne le vase d'argile,
autour de son volume vide,
et voilà une utile poterie.
De même, l'habitation exige
portes et fenêtres,
pour devenir habitable.
Ainsi, ce qui nous est utile
provient de ce qui n'est pas,
nommément le vide,
le creux, l'absence de forme.
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#12
Les cinq couleurs émoussent la vision humaine.
Les cinq notes assourdissent l'ouïe humaine.
Les cinq saveurs gâtent le palais délicat.
La chasse épuise le souffle du chasseur.
L'appât du gain et du profit de même.
Aussi le sage pense à son estomac, certes,
et sûrement pas aux fourbes apparences.
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#13
Cultiver l'opprobre, chercher les faveurs,
deux chemins tortueux, et pénibles !
L'injure et l'injustice sont blessures.
Redouter l'une et l'autre, donc.
Craindre l'infortune serait sage.
Préférer le sort convenable, selon moi.
Cultiver la vie, simplement.
Même si le sort est contraire.
La vie vient comme elle vient,
et elle va de même, sans doute.
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#14
Regarder, mais sans voir.
Ni savoir s'il y a danger inconnu.
Ecouter, mais ne rien entendre.
Savoir alors comme c'est rare.
Palper sans pouvoir toucher,
sans doute est-ce minuscule.
Trois aspects de l'indicible.
On peut les confondre.
Pourtant, si le sommet n'est pas
éclairé, la base n'est pas obscure.
Le lien est indicible, il appartient
au domaine de l'immatériel.
Comme une assertion sans assertion.
Et tout semble incertain.
Accueillir sans la voir l'apparence,
la suivre en ne voyant que son dos,
poursuivre selon le vieux chemin
la juste marche jusqu'au présent,
ainsi cheminer dans le bon sens,
tel est le présent du juste chemin.
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#15
Autrefois, le bien était un chemin pratiqué et connu
de chacun, sans qu'il soit besoin même d'en parler.
D'instinct. Ainsi le pouvoir était discrètement contenu.
Comme en hiver, on se prépare à traverser une rivière,
comme lorsque de toute part il y aurait danger,
alors il convient de garder contenance, prudence.
Le cœur simple est sans complication.
Il a l'apparence d'une vallée.
Il se trouble, comme l'eau chargée d'argile.
Il est tranquille comme l'immensité de l'océan.
Et pourtant incessant comme l'est le vent.
Ainsi circule son énergie, vivace et douce.
Paisible mouvement de la vie,
qui préserve son accomplissement,
sans qu'il soit besoin de le désirer.
Les humains ne sont pas parfaits, en effet.
C'est pourquoi ils se renouvellent, et vivent.
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#16
Celui qui choisit le chemin de la sérénité
se concentre sur le calme et le repos, le vide.
Il contemple la vie, et son cheminement,
comme une répétition, un permanent retour.
Ainsi les herbes des champs reviennent,
après floraison, à leurs racines,
les humains de même.
Retrouver ses racines, calmement.
Rester vivant, préserver la vie. Conscience.
Sans cette vigilance, constante, cauchemars.
Rester vigilant et attentif, maintenir la juste posture.
Le juste trouve le chemin du temps, ainsi.
C'est-à-dire le chemin de la longévité.
Jusqu'à ce que même le corps
ne connaisse pas la mort, peut-être !
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#17
Autrefois, les anciens étaient connus, car ils avaient
descendance, et parentèle multiple, et évidente autorité.
Par la suite, ils furent craints, puis méprisés,
on ne leur faisait plus confiance, hélas !
Paroles tombées aussitôt dans l'oubli.
Sic transit...
Ainsi en advint-il parmi les cent familles,
qui en prirent à leur aise, et se crurent libres.
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#18
Quand le juste chemin s'efface et s'obscurcit,
les humains en viennent à réclamer justice.
Quand l'intelligence et la sagesse manquent,
vient le temps de la grande supercherie.
Quand les six familles cessent de vivre en harmonie,
y aurait-il compassion et respect filial ?
Quand les contrées et les pays connaissent
désordre et confusion, y aurait-t-il
des citoyens loyaux et dévoués ?
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#19
Renoncer à la sagesse, oublier le sage,
les gens seront heureux, cent fois plus !
Oublier l'humanité, la justice, et les gens
retrouveront la compassion, le respect filial !
Renoncer aux magouilles, au profit, au vol,
les brigands et les prédateurs disparaîtront !
Ces trois comportements ne suffisent pas,
chacun trouve sa place selon la nature,
*la modestie de ses besoins, ou encore
la simplicité de ses désirs.
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#20
Oublier les nuances, choisir l'indifférence ?
Ne plus savoir où est le bien, ni le mal ?
Ne plus craindre ce qui effraie les humains ?
Perdre alors tous ses repères, dans la peur.
La foule se réjouit bien vite, bien vite.
Comme si elle disposait de l'abondance.
Pour ma part, je ne crois aucun présage.
Comme si j'étais encore un nourrisson.
Comme si j'allais à la dérive, en vain.
La foule profite des richesses et des biens,
moi, il ne me reste rien, semble-t-il.
Je suis un humain à l'esprit borné.
Je suis confus et incertain, quand la foule
s'enthousiasme, je défaille.
La foule examine attentivement,
moi, je suis empli de mélancolie.
La foule s'organise, je demeure,
stupide et borné, idiot, sans but aucun.
Seul parmi les humains, je révère
les nourritures que nous offre la mère nature.
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#21
Au creux du bon chemin, je chemine, justement,
sans hâte, pas à pas. La bonne direction me semble
difficile à cerner, à discerner. Indistincte et vague.
Comme la forme de l'apparence, semblance.
Comme une ébauche, une esquisse, une trace.
La matière, l'énergie, nous semblent obscurs secrets.
Pourtant le bon chemin est une évidence, formelle.
Elle a traversé les temps depuis l'antique à ce jour.
Sa valeur demeure, visible, lisible, formelle.
Elle demeure, comme un présent, éprouvé.
D'expérience.
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#22
Ce qui est courbé, faussé, devient juste, debout. Droit.
Ce qui était vide, se remplit. Ce qui est précoce devient mature.
Ainsi la sagesse humaine devient une, et juste.
Et le temps trouve sa forme unique.
Avec le temps, les choses trouvent leur raison.
Le temps est manifestation. Sans répit, tout devient.
Alors vient l'accomplissement. Sans vanterie.
Invariablement. Ainsi l'humain triomphe sans combat.
Parce qu'il avance sans combattre, vient le temps.
L'adage des anciens, comment pourrait-il mentir ?
Sincèrement juste et droit, il le devient.
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#23
Parcimonieuses, qu'elles le soient, tes paroles !
Comme le vent, qui ne dure pas plus d'une matinée,
et s'essouffle, comme la pluie soudaine, qui s'achève,
dans la journée. Le ciel les produit, en tel lieu,
ni la terre, ni le ciel ne durent au delà du temps…
N'en est-il pas de même pour les humains ?
Ainsi suivre le juste chemin, sans aucune hâte !
Celui qui suit le bon chemin est comme le bon chemin,
son caractère devient semblable au bon chemin.
Celui qui se perd en chemin devient semblable à sa perte.
Celui qui sourit au chemin de même, le chemin lui sourit.
Celui qui chante le juste chemin, de même,
le chemin l'enchante, et le réjouit.
Celui qui choisit le dénuement, la modestie,
la parcimonie, de même, ce chemin lui convient,
et lui sourit, tout simplement.
A l'évidence, il ne suffit pas de savoir comment cela est,
ni pourquoi, s'il n'y a pas d'évidence.
Et pourtant !
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#24
S'il ne se tient pas debout, droit,
comment pourrait-il marcher ?
S'il ne se félicite que de lui-même,
aura-t-il quelque éphémère mérite ?
S'il ne considère que sa propre personne,
n'est-il pas proprement insupportable ?
Ce voyageur-là ne sera-t-il pas méprisé
comme déchet, rebut infréquentable...
Nourritures et paroles superflues,
mauvaise route.
Le voyageur avisé se garde bien
de demeurer sur ce chemin-là.
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#25
Une chose confuse advient,
avant même que le temps ne soit venu.
Immobile, solitaire, unique, comme le vide,
cela demeure sans changer.
Comme un voyage immobile, sans aventure.
Peut-être un temps de gestation.
Pour ma part, je ne sais le nommer.
Le mot qui dirait son pouvoir,
ce serait la voie, le voyage, le juste chemin.
Dao. Le droit chemin.
Le pouvoir de ce nom est puissant.
Profond et fatal, à la fois, lointain, et proche.
Comme le revers de la médaille,
l'autre face des choses.
Ainsi, le chemin du voyage est puissant,
temps profond, démarche subtile,
comme celle des humains, le grand voyage.
Quatre domaines constituent le voyage.
Voici comment et pourquoi.
Le pouvoir du peuple, des humains,
réside dans leur union, ici, et là.
Le peuple suit la loi de la terre,
la terre suit la loi du temps,
et le temps suit la loi du juste chemin.
Le juste chemin est simplement
celui que convient de lui-même,
naturellement...
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#26
Lourd et pesant, racine de la légèreté.
Calme et tranquille, calme l'impatience.
Aussi rester lourd et lent, sérieux et calme.
Gentiment. Tout au long du chemin de la vie.
Même s'il existe quelque précieuse gloire,
passer outre, comme il convient.
Comment servir la multitude,
si l'on ne sait se conduire soi-même
avec pondération, mais légèreté, calme
et souriant, - tout au long du chemin.
Gentiment.
Le pouvoir observe les racines,
et abandonne l'impatience.
Bienveillance.
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#27
Marche sans laisser la moindre trace
de ton passage. Parle sans crainte
d'avoir à en rougir. Compte, mais
ne fais point de subtil calcul.
Ferme ta porte, si tu le souhaites,
mais sans la barricader d'un verrou.
Ce à quoi tu t'attaches, que ce soit
avec des liens suffisamment lâches.
Ainsi le sage s'attache à préserver
l'humain, sans asservir le peuple,
ni sans l'abandonner à son sort.
Son chemin le conduit à toujours
servir le bien, justement, en fait,
aussi ne l'abandonne-t-il pas.
C'est ainsi que s'éclaire sa démarche.
Il enseigne le bien aux humains,
sans avoir à enseigner, à proprement parler.
L'homme de bien s'adresse à ceux
qui ne le sont pas, certes, il leur est
comme une ressource, mais ils sont
pour lui aussi comme une ressource.
L'un et l'autre dépendent l'un de l'autre,
grande sagesse, grande merveille en vérité.
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#28
Garder conscience de sa force
et de sa faiblesse, est le juste chemin,
la mesure du temps et de ses aléas,
ainsi ses qualités demeurent,
vont et viennent, comme le fait l'enfant.
Garder conscience claire de la face sombre
des choses, et de la forme du temps,
ainsi les choses vont et viennent
sans atteindre l'excès ni la démesure.
Elles reviennent sans atteindre l'extrême.
Garder conscience que ni la gloire,
ni la disgrâce n'échappent aux aléas du chemin,
et le temps veille sur le chemin, comme il convient.
Simplement, la simplicité se suffit.
Elle est présente comme le meilleur moyen
et le sage se dirige grâce à elle, en fait.
Ainsi sommes-nous indemnes.
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#29
Celui qui désire prendre le pouvoir absolu,
il n'y parviendra pas. Je crois qu'il sera empêché.
Le pouvoir domine ceux qui le désirent, en effet.
C'est pourquoi ceux-là seront défaits,
et donc contraints à l'abandon.
Peut-être celui-là avancera, l'autre suivra,
mais l'un renâclera, l'autre s'essoufflera.
Prendre le pouvoir, par la force, sans doute,
et se retrouver vaincu, défait, sans doute,
c'est risque de destruction,
Aussi le sage s'écarte et prend ses distances,
il demeure pacifique et paisible,
à l'écart de ce chemin-là.
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#30
Ainsi le juste chemin conduit chacun
à se bien conduire, par lui-même,
et non à occuper son temps à user
ses forces à guerroyer, sans répit.
Les troupes installent campement
en des lieux souvent épineux,
en des positions conflictuelles,
où les armées font face au désastre.
Mieux vaudrait pouvoir choisir
une stratégie sans user de la force.
Obtenir ce résultat sans forfanterie.
Qu'il obtienne sans arrogance
l'arrêt des hostilités, sans user de ses forces.
Epuiser ses forces n'est pas le juste chemin,
la bonne démarche est sans violence.
Et peu importent les vieilles règles !
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#31
Les humains devraient se garder
des armes et des armées, qui sont
de funestes et mauvais présages.
Le noble se tient au second rang,
le général occupe la première place.
Les armées en effet sont
de funestes et mauvais présages.
Mieux vaudrait s'en passer.
S'arrêter avant d'y avoir recours.
Préférer la tranquillité paisible.
La victoire n'a rien de glorieux,
- rien de réjouissant à tuer d'autres humains.
Se réjouir des massacres est sinistre présage.
Aussi préférer le second rang, et non pas
la première place, qui convient au général.
Lorsque vient le temps des funérailles.
Le massacre de multitudes d'humains
est cause de larmes et de chagrin.
Lourds sanglots, l'armée est victorieuse,
- voici le temps des funérailles.
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#32
Le juste chemin demeure, sans lieu, sans nom.
Simple et minuscule instant, son énergie court le monde.
Le pouvoir semble le garder, il est accueillant à tout.
Le ciel et la terre s'accordent pour lui donner sa saveur.
Le juste chemin demeure, équitable pour tous.
Mais dès qu'il a été nommé, ce nom lui a donné naissance.
Et la loi commune est advenue. Comme une limite.
Connaître cette limite pour éviter le danger.
Ainsi il y a un chemin, qui suit le temps,
et un chemin comme la rivière, qui suit la vallée,
comme la rivière retourne à l'océan.
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#33
Connaître l'humain, chemin de la sagesse.
Se connaître soi-même, chemin de la compréhension.
Maîtriser l'humain, chemin commun du pouvoir.
Se maîtriser par soi-même, signe de force intérieure.
Connaître ce qui nous suffit, chemin de la richesse.
Améliorer la conduite des affaires, affaire de volonté.
Sans oublier certes sa propre durée, longévité.
Savoir que tout disparaît sans disparaître, pérennité.
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#34
Le juste chemin circule partout,
de droite, de gauche, de ci, de là,
la multitude des choses et des êtres
dépend de son parcours, qui les fait
advenir, et subsister.
Sans même que cela soit dit.
Il donne forme à la multitude
des choses et des êtres, sans même
les posséder. Jamais son désir
n'est dit, si minuscule soit-il.
La multitude des choses et des êtres
lui reviennent, lui retournent,
mais sans qu'il les dirige.
Aussi peut-on le dire grand.
Et il atteint sa fin sans qu'il soit
besoin de le dire grand.
C'est pourquoi il est grand.
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#35
Saisir la forme profonde du temps,
qui advient puis s'estompe, se dégrade,
mais vient sans difficulté, sereinement,
calme souriant, au plus haut point.
Il y aura des réjouissances,
festivités pour accueillir les hôtes,
et inviter les voyageurs.
Pourtant le bon chemin
paraît fade et insipide,
insuffisant en apparence.
On l'écoute sans l'entendre.
On l'aperçoit sans le voir.
Inépuisable présent.
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#36
Ce qui se trouve solidement fermé,
a probablement été ouvert auparavant.
Ce qui paraît affaibli, a sans doute été
fort solide auparavant. Sur le point de s'épuiser,
et autrefois florissant, de même.
A la veille de posséder, parfois,
au lendemain de donner, parfois.
Voilà petit savoir, minuscule trouvaille.
Ce qui est faible porte le germe du renforcement.
Le menu fretin demeure au profond de l'abîme.
Que le pays trouve profit et bénéfice
sans exposer ses forces ni sa population.
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#37
Le droit chemin demeure
sans qu'il soit nécessaire d'agir,
et pourtant il porte jusqu'à l'horizon.
Le pouvoir dominant en détient la garde,
la multitude s' y conforme en conséquence.
Elle s'y conforme et pourtant le souhaite.
Pour ma part, je m'en tiendrai au simple silence.
Sans un mot, simplement, demeurant sans désirs.
L'absence de désir produit la quiétude.
Et le temps en fait de même. De lui-même.
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#38
Le chemin du juste n'est pas juste
s'il a besoin de montrer qu'il est juste.
Une moindre bonté ne serait plus
de la bonté. La bonté agit
sans qu'il soit besoin d'agir.
Pourtant elle ne manque pas d'effet.
Une moindre bonté ne manque pas d'effet.
Les humains agissent, en effet,
et parfois n'agissent pas,
ce qui n'est pas sans effet...
Choisir la justice
pour agir ou non, et alors la servir.
Que l'action soit comme un don,
et non pas comme par devoir.
Suivre la confusion des armées
c'est s'y jeter, précisément.
Ainsi, quand les humains abandonnent
le juste chemin, ils perdent par là même
toute bonté, toute justice.
Manquer de bonté, c'est tourner le dos à son humanité.
Manquer d'humanité, c'est tourner le dos à la justice.
Manquer de justice, c'est tourner le dos au bon droit.
L'homme doué de loyauté pratique la parcimonie.
S' il récite le texte à la lettre, sans y penser,
langage fleuri, mais vidé de sa substance.
Le grand homme se tient à distance,
et marche à grands pas, sans pingrerie,
il préfère l'honnêteté aux discours fleuris,
aussi reste-t-il à l'écart des beaux parleurs.
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* * *
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Lao Tseu – Chemins –
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#39
Du passé nous provient la connaissance de l'unique.
Le ciel est clair et limpide, il est unique.
La terre est paisible et tranquille, elle est unique.
L'intelligence est spirituelle, lumineuse, elle est unique.
La vallée trouve la plénitude, elle est unique.
La multitude a la propriété unique de naître à la vie.
Le pouvoir a la propriété d'agir, dans la durée, ou non.
Il se transmet, ou dépérit, il est unique.
Le ciel, s'il perdait sa clarté unique, répandrait l'effroi et la terreur.
La terre sans sa douceur unique, répandrait la terreur, de même.
Les esprits, sans leur intelligence propre,
répandraient la peur sans répit.
Sans sa plénitude, la vallée deviendrait un désert stérile et sinistre.
La multitude, sans la faculté de donner la vie,
deviendrait stérile et sinistre. Le pouvoir,
sans sa mesure, deviendrait un effrayant gâchis.
Ainsi ce qui est valeureux peut considérer ce qui manque
de valeur comme ses propres racines et sa source.
Ce qui est haut et grand dépend de sa base, ses racines.
Le pouvoir lui-même dépend de la multitude,
et se prétend orphelin ou veuf, voire démuni de tout.
Ces assertions ont une origine, sans doute fallacieuse.
Sans doute ? Quémander une réputation, pas de réputation...
Le jade n'a aucun désir d'être considéré comme précieux,
c'est pourtant un ornement précieux comme s'il était de pierre !
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Lao Tseu – Chemins –
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#40
C'est du manque que provient
la fonction du chemin.
C'est de la faiblesse
que le chemin prend sa force.
Le temps préside à la durée
de la multitude des êtres vivants.
La vie vient naître là où elle n'est pas.
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Lao Tseu – Chemins –
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#41
Les écoles supérieures entendirent parler du Chemin,
et elles s'y appliquèrent. Les écoles populaires
entendirent parler du Chemin, comme d'une survivance.
Puis on entendit de grands éclats de rire, dérision à son propos.
Il n'est pas nécessaire de rire, pour agir et suivre le bon chemin.
Puisqu'il existe, pourtant, en vérité.
C'est un chemin secret.
S'engager sur le bon chemin ressemble
à son contraire, à se retirer.
L'apparence du juste chemin ressemble
à l'obscurité étrange d'une défaillance.
Et son cheminement ultime est comme le lit de la vallée.
Même l'extrême blancheur peut se trouver salie.
Qu'il ait de nombreux bénéfices ne semble pas suffisant.
Promouvoir une morale juste semble escroquerie, chapardage.
*
Ainsi disaient les anciens : « Le juste chemin ?
« c'est grand comme un carré qui n'a plus de coins,
« comme un outil devenu inutile,
« comme un son perdu dans le bruit,
comme une forme sans apparence... »
Le juste chemin demeure caché,
comme un silence sans paroles.
Le sage demeure sur le bon chemin,
jusqu'à lui prêter son accomplissement.
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Lao Tseu – Chemins –
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#42
Dao, le bon chemin appelle et engendre le premier pas.
Le premier pas appelle et engendre le second pas.
Le second pas appelle et engendre le troisième.
Puis le troisième appelle et produit la multitude
des choses et des êtres, celles et ceux du versant doux,
celles et ceux du versant solaire. Yin, yang.
Un souffle puissant préside à leur rencontre
et produit et engendre l'harmonie.
Mais les humains n'apprécient pas
la sensation de solitude et d'abandon.
Et même les pouvoirs hiérarchiques se qualifient ainsi,
comme s'ils étaient solitaires et démunis.
Et même les rois cherchent à trouver un équilibre convenable.
Des choses néfastes peuvent devenir profitables.
Des choses bénéfiques peuvent devenir néfastes.
A chacun de trouver l'enseignement qui lui convient.
J'enseigne cela, pour ma part. Utiliser la force,
c'est le moyen qui conduit au désastre et à la mort.
Je m'en tiens à enseigner ceci, comme un juste principe.
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Lao Tseu – Chemins –
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#43
Le temps veille sur la douceur, la lenteur,
prendre le temps, lui laisse celui de faire son œuvre !
Rien ne presse. L'énergie circule là où
elle ne rencontre pas d'obstacle, elle se glisse.
Subreptice, dans les interstices.
Pour ma part, je penche vers le laisser faire,
ne pas agir est souvent bénéfique et profitable.
Et ne rien dire, garder le silence,
demeure l'enseignement le plus sage.
Les choses se développent d'elles-mêmes.
Il n'est donc pas besoin d'agir.
Ainsi garder le temps
rare et précieux, de savourer le présent.
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Lao Tseu – Chemins –
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#44
Votre nom, ou votre vie,
lequel vous importe le plus ?
Votre vie, ou vos biens,
lesquels comptent le plus ?
Vivre malade ou mourir, que choisir ?
Parfois ce que nous aimons
est ce qui nous coûte le plus.
Même nos trésors les plus chers
peuvent venir à disparaître.
Savoir ce qui nous est suffisant
n'est pas une disgrâce.
Savoir où s'arrêter
permet d'éviter le danger.
Ainsi, préserver la durée,
permanence du temps.
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#45
Le grand succès ne manque pas de petits échecs.
La grande plénitude vient de petites et maigres contributions.
La bonne droiture suppose quelques courbes et courbettes.
L'esprit le plus vif semble parfois ralenti...
Le meilleur orateur a parfois la langue un peu lourde...
La patience tranquille l'emporte sur l'impatience fébrile.
La froideur l'emporte sur la chaleur.
L'esprit lucide et paisible,
bon usage du temps présent.
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#46
Le temps survint, et il y eut le chemin.
On y trouvait cependant le crottin des chevaux.
Le temps vint, où il n'y eut plus de chemin.
Dans les campagnes, il y eut des guerriers, et leurs chevaux.
Il n'est pire menace que de ne pas savoir où s'arrêter.
Il n'est pire calamité que de dépendre de ses besoins et désirs.
Mieux vaudrait connaître les limites de ses propres limites.
Ce qui suffit est toujours suffisant.
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#47
Sans même passer le seuil de la maison,
contemple le temps qui passe,
sans même regarder par la fenêtre,
contemple le cheminement du temps.
Plus loin, il va, moins il en sait.
Ainsi le sage trouve son chemin
sans bouger, sans regarder, sans parler,
en silence,
– sans agir, il atteint l'accomplissement.
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#48
Choisir l'étude et avancer, jour après jour.
Prendre le bon chemin, et devenir comme le juste chemin,
jour après jour. Avancer ou reculer, comme il convient.
Perdre son chemin, éveil de chaque jour.
Oublier son chemin, recommencer ! Répétition.
Ceci conduit à ne rien faire, si ce n'est délibéré,
librement réfléchi. Ne rien faire et pourtant avancer.
Choisir le bon moment, le bon jour, pour cela.
Joli travail, bon travail, bonne affaire...
Atteindre cela qui vous importe,
et ne pas se mêler du reste.
N'en pas limiter la durée, jour après jour.
Pérennité.
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#49
Le sage n'a point l'esprit immobile,
il se conforme à l'esprit des gens,
et agit selon son cœur.
Il considère les braves gens,
avec mansuétude et bienveillance.
Sa gentillesse embrasse aussi bien
les braves gens, et ceux qui ne le sont pas.
Vraiment, à l'évidence, il fait confiance.
Il donne sa confiance, même à ceux
qui ne lui font pas confiance, sincèrement.
Le sage demeure présent, là où il demeure,
même quand il voyage dans la contrée.
Il demeure présent même s'il a le cœur triste.
Les gens l'observent, l'écoutent, certes.
Sa démarche ressemble à celle d'un enfant.
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Lao Tseu – Chemins –
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#50
Perdre la vie, entrer dans la mort.
Sur ce chemin, si pour dix compagnons, il en reste trois,
on en comptera trois dans la mort.
Nous passons notre vie à rejoindre la terre.
Dix étapes, et trois compagnons aussi, de même.
Nous passons notre vie, vivant généreusement.
Bien entendu... Nous accumulons.
On dit que celui qui tient à la vie
ne rencontre point le tigre féroce.
Il ne claironne pas sa présence.
S'il croise des forces armées, l'absence
d'armure lui sert de défense, de couverture.
Le tigre passe sans pouvoir user de ses griffes.
Les soldats passent sans sortir le glaive.
Et s'il ne rencontre pas le trépas,
c'est parce qu'il n'était pas là.
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#51
La vie est le chemin. Le chemin cultive le vivant.
Le bon chemin suit ce qui bon pour le vivant.
Ainsi chaque chose trouve sa forme et son accomplissement.
La multitude des choses et des êtres
ne manque pas de suivre ce chemin, le chemin.
Il désigne ce qui nous est précieux, le juste chemin.
La bonté nous est précieuse, précisément comme la vie.
La droiture et la gentillesse, l'humanité en somme.
La raison du droit et juste chemin, c'est la vie,
qu'elle soit correcte, ou même bonne.
Le bon chemin assure la nourriture, la subsistance du vivant.
Il l'abrite, le soigne, l'élève, le cultive, le protège.
Il lui donne vie, sans la posséder.
Sans rien demander. Sans même agir.
Mystérieuse puissance, n'est-il pas ?
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#52
Sous le ciel, la terre est la mère des choses et des êtres,
la vie est apparue dans ce mouvement, puissant moment.
De ceci il provient que la mère produit ses enfants,
les êtres dont la mission, la fonction est de la protéger,
cette vie, cette terre, cette mère qui porte la vie..
De la garder de tout danger. Qu'ils gardent ce trésor,
comme derrière portes closes, c'est veiller sur la vie,
de préférence avec diligence, sinon serait-elle en danger ?
Le moindre détail nous éclaire, et nous conseille
de préserver nos forces, sans les dilapider. En douceur.
Garder l'esprit clair et lucide, ne pas risquer sa vie,
cultiver son corps et son esprit, toujours, toujours.
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#53
Si j'avais connaissance par moi-même de ce qui existe,
et de ce qu'il faut savoir, je m'en irais sur le grand chemin.
Je crains cependant d'y croiser les bandits de grand chemin,
et préfère les petits sentiers, bien peu fréquentés.
Les lieux écartés, la campagne inculte, les greniers vides,
les coutumes et les parlers locaux, les accoutrements régionaux.
Là où l'on se moque des nourritures communes
et des breuvages ordinaires,
c'est-à-dire chez les prédateurs,
c'est le résultat d'un pillage,
dont il n'y a pas lieu de se vanter.
Ce n'est point cela, le bon chemin, n'est-ce pas ?
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#54
Celui qui choisit d'entreprendre le bon chemin,
ne doit pas craindre que son choix soit mis en cause,
sinon les générations suivantes abandonneraient
à leur tour le respect des anciens, en retour.
Cultiver la vie, la bonne forme, bonne habitude !
Cultiver la famille, la gentillesse, honnête habitude.
Développer le village, ses échanges, et il demeure.
Développer le pays, ses richesses, créer l'abondance.
Veiller sur le temps et la durée, sur le présent,
qu'ils soient généreux pour chacun et pour tous.
Ainsi la vie devient vraiment notre bien essentiel.
Veiller sur la famille, et selon la famille,
veiller sur le village, et selon le village,
veiller sur le pays, et selon le pays,
veiller sur le temps, et selon le temps,
qui passe, vient et s'enracine, précisément
selon qu'il suit ou non le bon chemin, justement.
Je sais cela, d'évidence, puisque c'est ainsi !
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#55
Qui persévère dans la gentillesse et la générosité,
est comme le nouveau-né, qui ne craint point
les piqûres des insectes venimeux,
ni les bêtes féroces, ni les oiseaux de proie.
Ses os sont souples, ses muscles sont frêles,
et pourtant, il tient fermement ce qu'il prend.
Il ne connaît pas la différence des sexes,
et pourtant le sien se dresse déjà.
Son énergie a déjà atteint sa plénitude.
Il crie toute la journée, sa voix ne s'éraille pas !
Il vit en harmonie avec lui-même.
Connaître cette harmonie est comme présence.
Connaître cette présence est comme compréhension.
Améliorer la vie, c'est une bénédiction.
Le souffle vital améliore et fortifie le cœur et l'esprit.
Quand les choses se renforcent, elles vieillissent.
Et cela n'est pas suivre le bon chemin...
Ce n'est pas le bon chemin de s'arrêter en chemin !
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#56
Celui qui sait n'en dit rien,
celui qui en parle n'en sait rien.
Embarrassé, discret, déluré, confus,
il chantonne, ignorant la poussière,
en harmonie avec les détours du chemin,
sa démarche semble obscure, mystérieuse.
C'est ainsi qu'il semble sans relations,
dénué d'attaches, comme négligeant.
Impuissant, et pourtant profitable,
innocent, et pourtant sans danger,
inaccessible, et pourtant indispensable,
insuffisant, et pourtant de peu d'arrogance.
Ainsi le mouvement du temps,
cheminement, sereinement,
trouve sa noble et juste mesure.
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#57
Avec droiture, gouverner le pays.
Avec parcimonie, utiliser l'armée.
Sans rien faire, choisir son temps.
Et je sais que ce chemin est correct.
Voici pourquoi.
Quand le temps est à l'interdiction,
aux impôts, aux restrictions,
le peuple s'appauvrit.
Quand le peuple perd ses moyens de vivre,
les familles souffrent de la famine.
Les hommes trouvent alors
des moyens de survivre, malgré leurs peines,
et les rapines prolifèrent, en conséquence.
Ainsi parle le sage. Le peuple apprend,
et change, sans qu'il soit nécessaire d'agir,
J'aime le calme et la tranquillité, certes,
le peuple aime aussi la droiture et la bonté.
Je n'apprécie pas les affaires, le peuple
chérit les richesses, certes. J'aimerais
n'avoir aucun besoin, le peuple, de même,
aimerait une vie facile, tout simplement.
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#58
Si le pouvoir s'essouffle ou s'éteint, alors
le peuple, honnêtement, devient honnête...
Si le pouvoir devient inquisiteur, alors
le peuple semble manquer de tout !
Le désastre suit les temps fastes,
sans cesse, et l'inverse de même.
Ce qui paraît bon et bien
nous séduit en vain, et s'avère néfaste...
Nos passions nous aveuglent, et les temps
deviennent insupportables, longtemps.
Aussi l'homme sage choisit ce qui est juste,
il évite ce qui ne l'est pas. Sans doute.
Il se montre correct, sans être blessant.
Il est droit, sans être hypocrite et fourbe.
Il reste lucide, sans se croire éblouissant.
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#59
Gouverner les humains et leur affaires
n'exige rien d'autre, en vérité, que la parcimonie.
L'homme économe prend soin de lui-même,
dès le matin, avec modération, et dès lors,
il économise ses forces et son temps, à foison.
Ce faisant, il accumule de quoi tout réussir.
Rien ne l'arrête, sur ce juste chemin.
Il suit ce principe, et le voilà à la tête du pays.
Car il considère le pays comme sa terre maternelle,
et la respecte assurément longtemps et pour longtemps.
Ce sont là de profondes et solides racines.
Tel est le bon chemin pour atteindre une longue vie.
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#60
Gouverner un grand pays ressemble
à cuisiner de la petite friture !
C'est pourquoi le bon chemin suppose
que le responsable préposé veille
sur le temps et non sur les esprits,
non sur les supposés fantômes.
Les esprits ne blessent pas les humains.
Le sage non plus ne blesse pas les humains.
Pour quelques sous, les humains
échangent des coups et se blessent.
Bonne raison pour reprendre
le bon chemin, et comment !
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#61
Un grand pays dépend des fleuves qui le traversent.
Le ciel lui procure la terre, le temps lui procure les ressources.
Les femmes lui donnent progéniture, et quiétude,
les hommes de même, quand ils agissent paisiblement.
Ainsi, les grands pays s'organisent comme les petits,
qui le composent, et qui échangent et commercent.
Et les petits pays s'organisent pour devenir grands.
Ainsi vont et viennent, se font et se défont les alliances.
Un grand pays ne peut montrer deux fois son appétit
pour les mêmes populations locales. Les petits pays de leur côté
n'ont pas le désir d'être confrontés aux barbares !
Ainsi ces deux catégories de pays voient leurs vœux exaucés.
La modestie est reine. Grandes perspectives, en effet !
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#62
Le bon chemin comporte certes
une multitude de choses obscures.
Les hommes bons lui sont précieux.
Ceux qui ne le sont pas le servent aussi.
D'excellentes paroles peuvent bien
occuper et décorer la place publique...
D'excellents passants et chalands
enrichissent bien des marchands.
Et ceux qui manquent de bonté,
faudrait-il les jeter à la rue ?
C'est ainsi que fut instauré le règne
d'un fils du Ciel, avec trois ministres.
On salue la bonne fortune, par avance,
et ses quadriges et ses chevaux, certes,
mais mieux vaut ne pas s'asseoir
au milieu du chemin, si l'on veut
avancer sur le bon chemin.
Les anciens respectaient le bon chemin,
sans proclamer leur vertueuse recherche.
Il reste bien des injustices à effacer.
Ainsi le pouvoir s'estime noble et précieux !
Ah !
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#63
Agir mais sans rien faire,
travailler, mais sans rien faire,
savourer la vie, mais sans la dévorer,
qu'elles soient petites ou grandes,
rares ou multiples, justes ou injustes,
les choses viennent comme il faut bien...
Prendre les problèmes difficiles,
comme s'ils étaient simples et faciles,
agir en profondeur,
en paraissant superficiel.
Le temps concocte des situations complexes,
nous les prendrons comme simples et faciles.
Le temps nous offre de grandes choses,
nous les prendrons par le menu détail.
C'est pourquoi le sage aboutit à ses fins,
mais non pas par de grandes actions.
Et pourtant, ses résultats sont excellents.
Celui qui s'engage à la légère n'obtient
que rarement ce qu'il a promis.
Bien des choses qui paraissent simples
s'avèrent compliquées et difficiles.
C'est pourquoi le sage considère
que les choses sont complexes et difficiles.
De là vient qu'il parvienne à ses fins,
sans rencontrer aucune difficulté.
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#64
Ce qui est paisible s'avère simple à conduire.
Ce qui est précoce s'avère facile à diriger.
Ce qui scintille est aisé à fondre et mélanger.
Ce qui est minuscule particule peut bien s'éparpiller..
On peut dès lors agir précocement,
prendre soin de ce qui paraît prématuré, sans doute.
La graine de l'arbre n'est qu'une becquée,
de la taille d'un poil de pinceau, à son apparition.
Le donjon et ses neuf étages proviennent
d'une simple poignée d'argile.
Le chemin d'un voyage de mille lieux commence d'un seul pas.
Celui qui agit, produit sa propre perte,
quand il s'accroche à son échec.
Le sage n'agit pas, il y renonce,
et c'est pourquoi il ne connaît pas l'échec.
Sans s'attacher à rien, il ne connaît pas la perte.
Le peuple s'assemble pour agir, s'affaire, et le plus souvent il échoue.
Etre attentif à la fin aussi bien qu'au commencement,
pour ne pas connaître l'échec.
Ainsi se comporte l'homme sage.
Il désire, et son désir est de ne pas désirer.
Il ne désire rien de précieux, ni rien de rare,
ni biens, ni richesses, ni propriétés.
Il étudie, sans avoir à étudier,
le cheminement de la multitude lui sert de subsistance, de vie.
C'est ainsi qu'il vient en aide au peuple,
en étant lui-même juste et équitable, sans même oser s'en mêler.
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#65
Le juste chemin, selon les anciens,
ne devait pas guider le peuple vers le bien,
ils le considéraient comme cheptel stupide.
Le peuple en devenait donc ingouvernable.
Et la sagesse se trouvait dilapidée en pure perte.
Car elle devait servir à guider le pays,
non le pays et ses voleurs !
Mais servir seulement le pays !
Le pays profite de sa bonne fortune,
s'il préserve à la fois la forme de son sol,
et en respecte la nature, précisément.
Obscurs chemins, profonds mystères.
Observer le mauvais pour trouver le bon...
Ainsi se produit l'amélioration des choses.
Raisonnables perspectives !
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#66
Les fleuves et les océans occupent la première place
dans l'ordre des énergies de la terre, cent vallées
en font la preuve. Ainsi les eaux répandent leurs bienfaits.
Et leur domaine s'étend par cent vallées.
C'est pourquoi le sage, s'il veut atteindre le peuple,
suit le même chemin, par le fond des vallées,
s'il désire être en première place, il fait abstraction
de sa personne et de sa vie, ainsi est-il sage.
Le peuple le respecte, parce qu'il n'est pas une charge.
Il est respecté, en premier lieu, parce qu'il n'est pas blessant.
Il aime le rire, la gaieté, mais pas ce qui est détestable.
Il n'ouvre aucune hostilité. Et personne ne peut l'affronter.
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#67
Grande idée que ce chemin, qui pourtant
ne ressemble à rien. Il chemine loin,
c'est pourquoi il n'est semblable à rien d'autre.
Rien d'étriqué dans cette notion de juste chemin.
Je pense qu'il existe trois précieux trésors.
Je les vénère et les respecte.
En premier lieu, je nomme la bienveillance.
La gentillesse, la compassion, l'humanité.
A la seconde place, je propose la parcimonie.
Au troisième rang, le fait de ne pas même oser
postuler aux responsabilités ni au pouvoir...
La bienveillance permet l'humanité.
La parcimonie permet l'harmonie.
La modestie permet la longévité.
Si aujourd'hui on oublie la bienveillance,
on perd l'humanité. Si on perd la parcimonie,
on oublie l'harmonie. Abandonner
la modestie serait mortelle prétention.
Ainsi, la bienveillance conduit à la victoire.
Elle est un invincible modèle.
Le temps lui donne raison, toujours.
La compassion est don suprême.
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#68
Celui qui cherche à bien agir, dans l'art de la guerre,
n'a rien d'un guerrier. Pour bien combattre, aucune colère.
La bonne victoire ne provient pas d'y prendre part.
Pour bien utiliser les troupes, il faut être à leur service.
Ne pas avoir à combattre est en fait un art.
Ainsi les forces humaines sont préservées.
Tel est l'enseignement suprême
que les anciens portaient au plus haut point.
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#69
Ancien dicton. Stratégique. Pour ma part,
je n'ose agir comme un seigneur de guerre,
mais plutôt comme un simple visiteur...
Ne pas oser avancer d'un pas, ni entrer,
mais plutôt décliner l'invitation. Mon avis.
Marcher, sans s'avancer.
Avancer, mais les bras ballants.
Saisir la situation, mais sans intervenir.
Personne ne subira de grand désastre,
s'il n'a que gentille opposition...
En douceur, la contradiction,
et les pertes seront selon moi
comme un précieux trésor...
Aussi, dans un conflit à forces égales,
la victoire va à celui
qui se montre miséricordieux.
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Lao Tseu – Chemins –
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#70
Ce que je dis est très simple à comprendre.
Et très simple à pratiquer.
A présent, personne ne m'entend,
personne ne met en pratique.
Mes paroles ont une source, mes travaux ont un ordre.
Cela reste méconnu. Et je reste méconnu.
Rares sont ceux qui me connaissent.
J'en suis pourtant tout à fait flatté !
Car ce sont des hommes sages.
S'ils portent des guenilles,
leur cœur est comme de jade.
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#71
Savoir que l'on ne sait pas,
tout d'abord. Certes.
Ne pas savoir ce que l'on croit
savoir, quelle tristesse !
S'attrister en vérité de cette tristesse,
ne mérite pas de s'attrister.
Le sage ne fait pas sienne
cette affligeante tristesse.
Il souffre de tristesse,
sans tristesse.
Souriant doucement.
Joyeusement, donc ...
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#72
Les citoyens ne craignent pas le pouvoir,
mais ils craignent son excès, énormément.
Ils cherchent des logements décents,
et des lieux habitables, non pas détestables.
Insupportables, exécrables, invivables.
Ainsi, il n'y aurait aucune détestation,
ni diatribes, ni récriminations.
Sages paroles, bon exemple, en somme.
Le sage se connaît, et demeure modeste.
Il s'estime lui-même, et ne s'enrichit pas.
Il discerne ce qui bon, et s'y tient, sans excès.
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#73
L'excès de bravoure conduit au massacre.
La bravoure qui ne se montre pas préserve la vie.
Ces deux attitudes conduisent
soit au meilleur, soit au pire.
Quand les temps sont mauvais,
qui saurait ce qui peut arriver ?
Quand les temps sont favorables,
ne pas s'y opposer conduit au succès !
N'en rien dire est la bonne réponse.
N'y rien faire, de même !
Le bon chemin est stratégie.
Le temps est un maillage d'instants,
d'allers et retours, d'inadvertances
et de récupérations. Régulation.
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#74
Le peuple ne craint pas de mourir,
et qu'y faire pour qu'il craigne cela ?
Comment l'inciter à craindre la mort ?
Faudrait-il quelque curieux miracle ?
Faudrait-il oser s'en saisir et le mettre à mort ?
Celui qui prendrait la responsabilité
de ce possible massacre, ce serait le bourreau ?
Les humains s'entre-tuent depuis toujours.
Cela ressemble au grand ouvrage
du bûcheron, qui entreprend de tailler la forêt.
Mais il n'est pas rare de voir celui-ci s'estropier,
et se couper le bras ou la main.
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Lao Tseu – Chemins –
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#75
Le peuple a faim,
parce que les dirigeants se nourrissent
de nombreuses taxes
qui sont causes de la disette et de la famine.
Et le peuple devient difficile à gouverner.
Voilà pourquoi les dirigeants ont du mal à gouverner ;
le peuple considère la mort comme à la légère.
Car il attend de la vie qu'elle lui donne une mort facile.
La vie de chacun ne dépend pas de nous-mêmes.
Et pourtant, n’est-elle pas un bien précieux...
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Lao Tseu – Chemins –
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#76
A sa naissance, l'humain est souple et faible.
Quand il meurt, il est ferme, solide et fort.
L'arbre et les plantes de même, naissent
souples et chétifs, ils meurent
desséchés, raides et pourris.
Ainsi, ce qui est fort et solide
devient compagnon et voisin de la mort.
Le pouvoir des forces armées de même
est voué à l'extinction.
C'est la force même de l'arbre
qui le conduit à être abattu.
La grande force réside dans la faiblesse.
Ce qui est doux et faible persiste.
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#77
Le temps nous offre un cheminement
qui ressemble à l'arc de l'archer,
dont les deux extrémités se meuvent ensemble.
L'une monte quand l'autre descend.
Le surplus est diminué, le manque est rectifié.
Le temps est un cheminement
qui équilibre les défauts et les qualités,
harmonise le nécessaire et le suffisant.
Quant au cheminement des êtres humains,
il manque de discernement.
Ils prennent sans restituer,
ils donnent à ceux qui ont déjà trop,
ils oublient ceux qui n'ont déjà rien !
Qui ferait le contraire ? Le sage ?
Celui qui suit le juste chemin est sage,
il agit sans escompter de retour,
il accomplit son ouvrage, sans répit,
et ne désire même pas
passer pour … un bon diable !
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#78
L'eau semble le plus faible et le plus malléable
des éléments de la nature. Pourtant,
rien ne lui résiste, de plus, elle est indispensable.
Le faible triomphe du fort.
Le doux triomphe du dur.
Personne n'ignore cela, et pourtant...
Le sage expose ceci :
Subvenir aux besoins du pays, quand il va mal,
c'est comme posséder la maîtrise du millet.
Soutenir les chances du pays, quand il va bien,
c'est comme agir selon le temps présent,
sans qu'il y ait lieu ni besoin d'agir.
Chaque médaille a son revers, comme on dit.
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#79
L'harmonie entre les peuples et les gens
ne va pas sans un reste de désaccord :
retrouver le calme demande des actes justes.
C'est pourquoi le sage considère
les deux parties de l'accord, et n'exige rien
de personne pour sa propre part.
Il est juste que les accords soient respectés.
Il n'est pas juste de passer outre.
La bonne justice ne favorise personne.
Mais toujours elle s'accorde avec le bien public.
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Lao Tseu – Chemins –
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#80
Imagine un petit pays, pas trop peuplé.
Aurait-il quelque besoin de guerriers
chevronnés, et de leurs armes ? Certes pas.
Aurait-il quelque besoin de s'exiler et
d'aller mourir au loin ? Certes pas.
Aurait-il des vaisseaux, ou des chars,
en nombre suffisant, des armes et des cuirasses,
il ne les sortirait pas, et reviendrait aux vieilles techniques,
aux anciennes habitudes, aux usages ancestraux.
Il retrouverait alors le goût et la saveur
des nourritures simples.
Son bel habillement serait ses ornements.
Ses habitations seraient paisibles et tranquilles.
Les rires et la musique seraient ses festivités.
Les pays voisins prendraient son exemple.
Aux alentours, les aboiements des chiens,
et le chant des coqs, tranquille campagne…
Les gens deviendraient vieux,
jusqu'à l'heure de leur mort,
sans même la voir venir.
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Lao Tseu – Chemins –
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#81
Les paroles vraies n'ont pas besoin d'être belles.
Les belles paroles ne sont pas toujours véridiques.
Celui qui est bon n'est pas bavard, les arguments
du bavard ne sont pas toujours sages.
Celui qui sait sait qu'il ne sait pas grand-chose,
celui qui étale son savoir ne sait rien.
Le sage ne thésaurise rien.
Dès lors qu'il se comporte comme un être humain,
son bonheur est acquis.
Dès lors qu'il agit comme un être humain,
il améliore le sort des autres humains en grand nombre.
Le bon chemin fait du bien, et ne blesse personne.
Sage est l'homme dont le cheminement
suit cette action sans dispute ni violence.
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Ce que nous sommes, en somme.
*
Epilogue
*
Nous sommes
l'air que nous respirons, et qui nous inspire, invisible,
nous sommes le vent qui passe, et laisse quelques traces,
dans la poussière. Particules en suspension, traces.
Nous sommes
la pluie, et l'eau des rivières, le lac et l'océan,
la cascade qui murmure, et nuages vagabonds,
l'eau que nous buvons, qui circule, nous lave,
désaltère, nous abreuve, et nous maintient vivants.
Et nous déversons à foison lisiers et déchets divers,
dans cette eau trouble ou claire que nous buvons.
Nous sommes
le souffle du vent, qui ridule la surface de l'étang,
et fait chanter le feuillage des arbres, des saules
sous les nuages, des charmes et des trembles.
Et nous détruisons les forêts primaires, sans vergogne.
Nous sommes
les larmes et la souffrance, la peine et le deuil,
l'oubli et la mémoire. Et parfois la joie, les retrouvailles,
l'amour ou l'amitié, la douceur ou la tendresse,
bienveillance.
*
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Lao Tseu – Chemins –
Nous sommes ce feu qui nous réchauffe, nous anime,
et nous brûle, ou parfois nous dévore.
Nous sommes du pays du soleil, venus des étoiles,
mais aussi rêveurs de nouvelles lunaisons.
Nous sommes l’orage qui se déchaîne, et ravage
les villages et les champs, désastre dans les vignes.
Nous sommes la guerre, et la colère, et la désolation.
Nous sommes l’épidémie et la folie, l’ordinaire maladie.
Nous sommes le feu nucléaire qui couve dans nos centrales,
et produit des scories indestructibles et mortelles.
Nous sommes l’indifférence,
Nous sommes chaque enfant mort dans l’indifférence,
de soif et de faim, d’épuisement, de misère.
Nous sommes les bons sentiments qui nous inondent,
les belles paroles vaines, le discours humanitaire.
Nous sommes nos rebuts et nos déchets,
nos chômeurs et nos vieillards, ceux que nous laissons
sur le bord de la route, nos poubelles pleines,
le vide même de nos poubelles, ordures.
Nous sommes l’horizon, qui sépare et réunit,
entre ciel et terre, le temps qui passe, celui qu’il reste,
entre nous autres, et l’autre, nous sommes les barbares
devant la barbarie, dans le miroir éblouis.
Nous sommes la terre et la matière, le temps et l’énergie,
nous sommes ce qui nous manque, et nous fait de désir,
nous sommes ces paroles oubliées, promesses vides,
nous sommes l’eau parcimonieuse de nos partages.
*
87
Lao Tseu – Chemins –
Nous sommes nos rêves délaissés, et nos réalités présentes.
L’immensité de nos richesses, de nos cultures,
de nos savoirs, de nos biens, et la pauvreté insoutenable
de l’humanité presque toute. Insondable mystère.
Nous sommes dépositaires de cette petite planète,
qui nous abrite, nous offre ressources et nourritures,
nourrira peut-être nos enfants, ou nos petits-enfants,
et deviendra un jour ultime destination. Humus.
Rien qui presse, cependant, rien d’urgent.
Nous sommes aussi la petite mélodie,
qui danse dans les collines, la fonte des neiges,
le printemps et les rires joyeux des enfants,
le passage des saisons et des ans,
le sourire doux du sage, la main tendue,
la musique des nomades,
la beauté du désert,
la rêverie du poète.
nous sommes la vie qui chemine,
comme elle vient, comme elle peut.
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* * *
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Lao Tseu – Chemins –
*Lao Tseu – Chemins.*
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http://fr.scribd.com/doc/215821242/Lao-Tseu-%E2%80%93-
Chemins-%E2%80%93-v03-pdf
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*Bon Voyage ! Lao Tseu*
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http://www.scribd.com/doc/210294540/Bon-Voyage-Lao-Tseu
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Lao Tseu – Chemins –
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Lao Tseu
– Chemins –
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Traduction minutieuse et libre
Alain Constantin & Paco Alpi
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nouvelle édition,
revue et révisée,
texte intégral.
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90
Lao Tseu – Chemins –
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http :// www. scribd. com / doc /215821242/ Lao - Tseu -% E2%80%93-
Chemins -% E 2%80%93- v 03-pdf
● Voir aussi, si vous voulez, Le Mémoire de la Mue,
un document mémorable et vénérable.
Un chef d’oeuvre de la littérature chinoise.
http :// www. scribd. com / doc /352524/ Le - Memoire - de - la - Mue - Yi - Jing-
v5
● Voir aussi, si vous voulez, Les Quatrains
d’Omar Khayyâm, charmant classique persan.
http :// www. scribd. com / doc /6226809/- Les - Quatrains - OmarKhayyam
● Et quelques textes de référence :
http :// www. scribd. com / Paco %20Alpi
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Licence Creative Commons (CC BY-NC-SA 3.0 FR)
Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les
Mêmes Conditions 3.0 France
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